"Un monde est assoupi sous la voûte des cieux ?
Mais dans la voûte même où s'élèvent mes yeux,
Que de mondes nouveaux, que de soleils sans nombre,
Trahis par leur splendeur, étincellent dans l'ombre."

Le son de ma voix n'était qu'une caresse de velour dans la noirceur de cette nuit sans nuage, laissant flotter dans l'air ces derniers vers comme un hommage à sa beauté. Il y avait longtemps que je n'avais eu l'occasion de contempler un tel ciel. Cela me donnait l'impression que tout les astres s'étaient réunis en un même point de la voûte céleste pour combler le manque de clarté que provoquait l'absence de la Dame de la nuit. Et moi j'étais là, allongé sur le toit de verrerie des serres de botanique, perdu dans mes pensées, m'oubliant moi-même tandis que mes paupières se refermaient.

Je me sentais porté loin de mon corps, balloté que j'étais entre souvenirs, images présentes et songes nébuleux. Comment définir le réel de l'irréel lorsque le mensonge noie la vérité ? Y a-t-il un moyen de dissocier passé, présent et futur alors que toutes les causes et conséquences s'entremêlent dans un echelas inextricable de fil ? Le temps semblait se jouer de moi comme un vulgaire grain de sable pris dans la course d'un sablier, s'égrenant dans une infinie lenteur. Et ce soir, je ne me sentais plus capable de lutter contre ces courants tumultueux qui agitaient à leur guise ce monde. Mon monde. Monde qui semblait peu à peu se vouer à la perdition...

Fatigué. J'étais tout simplement éreinté de tout ce cirque. Au final tout autour de moi n'était qu'une vaste plaisanterie de mauvais goût, théâtre des gamineries des uns, tandis que d'autres mettaient en lumière leur stupidité. Haine, mépris, trahison, révolte... Tout ses mots ne faisaient qu'entraîner toujours plus de sang et de mort dans leurs sillages. Le plus ironique dans tout cela, c'est que personne ne semblait s'en soucier. Et comme si cela ne suffisait pas, il fallait que les acteurs de ce mauvais jeu se plaisent à faire revivre des actes passés de notre histoire, projetant en évidence sur la scène des ennemis ancestrales dans leur lutte éternelle.

Qui ? Pourquoi ? Que cela apporterait-il vraiment au bout du compte ? Quelqu'un sortirait-il vraiment gagnant de ce combat qui se profilait de plus en plus distinctement ? A mon grand dam, je craignais au fond de moi de connaître par avance la réponse à cette question. Ce combat perpétuel qui se livrait à Poudlard ne trouverait pas de fin heureuse, car si les protagonistes ne se décidaient pas à mettre un terme immédiatement à cette montée de violence, nous nous dirigerions droit vers un lendemain sans soleil. Une aube faite de sang et de larmes.

Mais en même temps, qui aurait la capacité de faire sauter les rouages de ce formidable engrenage de haine qui s'était mis en route. Entre Humains, Lycans et Vampires, le seuil de tolérance avait voler en éclat. A qui la faute ? Certains vous dirait sûrement que ce fut ce petit et méprisable héritier humain qui déclencha les hostilités, muré comme il l'était dans le mépris et la peur. D'autres affirmeraient plutôt que tout avait commencé par les agissements et le comportement sanguinaire de celle que certains avait nomnés la reine des damnés. Ou peut être était-ce dû à ses chiens pouilleux qui se fondaient parmi les humains et montraient les crocs à leur 'cousins'. Quoiqu'il en soit, même la volonté la plus forte ne semblait disposer de la capacité de calmer le jeu entre tous, un dialogue qui ne semblait même pas envisageable tellement les gens se muraient dans leurs différences.

M'étirant de tout mon long sur le verre lisse et glaciale du toit, je plissais de nouveau les yeux en direction des cieux vertigineux, essayant d'oublier momentanément l'instant présent. Le dais étoilé qui recouvrait la nuit n'était que pure merveille, laissant apparaître à l'oeil nu des constellations chargés de mythes et de légendes tandis que d'autres se laissaient deviner par de lointain assemblage. On racontait que la carte du ciel était le livre sur lequel de tout temps les hommes avaient gravés leurs histoires, exploit et souffrance, amour comme châtiment.

"Un jour ta vanité te perdra... A ce moment la, puisses-tu partager le même tourment que Cassiopé pour le reste de l'éternité..." murmurais-je pour moi-même en abaissant mes prunelles brillantes vers la silhouette que je venais de remarquer quelques mètres plus bas.

Et dire que j'étais venu ici pour trouver un instant de solitude et de contemplation, loin de toute présence, et particulièrement de la sienne. Mais non bien sur, il avait fallu que ce soit celle que je voulais éviter le plus qui se pointe pour gâcher cette nuit sans lune. Non pas que j'ignorais qu'il fallait bien à un moment ou à un autre que l'on discute, mais pour être honnête j'avais tâcher de repousser la confrontation autant que possible... Poussant un soupir de résignation, ma voix moqueuse prit un ton faussement enjoué tandis que je m'adressais à elle.

"Quel plaisir de pouvoir profiter de ta joyeuse compagnie cette nuit Ailyn ! Cela faisait si longtemps figure-toi, que je me languissais de toi."